⊱ She was built from her pain and her mistakes

TRIGGER/WARNING (nuancé) :
SEXISME, VIOL, HOMOPHOBIE, HARCELEMENT SCOLAIRE, TENTATIVE DE SUCIDE

Métisse, sang-mêlé, bâtarde… Aucun répit ne lui fut accordé, nul part, à aucun moment. Elle était jugée coupable des soi-disant crimes de ses parents et des siens. Eux, couple improbable formé par une jeune femme venant à peine d’entrer dans le monde des adultes et par un homme en pleine crise de la quarantaine qui largue la compagne de presque toute une vie, parce qu’il a reçu un coup de foudre en plein cœur. Et Stella, môme choyée et couvée, la petite dernière méprisée par la fratrie parce qu’elle existe, parce que le paternel s’est attendri. Elle est sa princesse, celle a qui il n’oserai rien refuser si elle le voulait, celle qu’il gâte et dont il comble le moindre désir avant même qu’elle l’ai prononcé.

Sa vie est une prison dorée où elle ne peut faire un pas, un geste, sans être observée et critiquée. L’oiseau ne s’envole que lorsqu’elle trouve du réconfort auprès de ses parents et de ses quelques amis. Tous les autres sont faux, fourbes. Il y a un malaise latent mais la gamine ne sait mettre de mots sur cet environnement et cet entourage, même après avoir atteint la préadolescence. Elle voudrait comprendre, entendre ce que les murs cachent mais même s’ils ont des oreilles, malheureusement ils n’ont pas de bouches. Et du jour au lendemain, maman est jetée comme une paria, en sanglot ; papa fulmine, totalement méconnaissable. Des secrets encore et toujours. Elle est trop jeune pour comprendre Stella, tout ce merdier, tout ce mal. Elle ne saisit pas pourquoi quelqu’un se séparerait si soudainement de celle qui avait tout affronté pour être avec lui, alors qu’on la traitait de vénale, de croqueuse d’homme, de parvenue. Pourquoi ? Mais elle décide d’aller vivre avec celle qui la porté en son sein. Elle sait ce que c’est que d’être seule contre tous et il est hors de question qu’elle l’abandonne comme les autres l’ont fait.

Tout a changé, elles partent vivre loin, où on ne les connait pas et où leurs vies n’obsèdent personne. Plus rien n’est pareil à Paris. La liberté est grisante, certes, mais ça s’arrête là. Celle qui était un véritable rayon de soleil, et qui est redevenue Madame Byeol, est en pleine dépression, repliée sur elle-même, démolie. Dès lors, la future héritière, reprend les rênes. C’est la fille qui prend soin de la mère, qui la relève petit à petit, qui la protège et la cajole. Le rôle est tout nouveau et le fardeau trop lourd à porter pour ses frêles épaules. Alors au fil des mois l’incompréhension se change en colère. Les brimades, le mépris et les insultes remontent à la surface tandis que l’absence et le silence criant du père enfoncent le clou. Cette famille… cette vie… Elle n’en veut plus.

Certains secrets, certains mensonges remontent aussi à la surface. Monsieur Loong fait tout le voyage, jusqu’en France. Cette fois, c’est sa deuxième ex-épouse qui fulmine et lui qui pleure. Les murs ne parlent toujours pas : Stella écoute aux portes et entend l’inimaginable. Et tout lui revient en mémoire. Cette famille patriarcale, conservatrice, dénigrant à huis-clos les personnes n’étant ni de leur rang, ni de leur sang et en haut de la liste se situaient les plus faibles selon eux. Les femmes et la communauté LGBTQ. Elle se souvient que tous ceux de la famille  qui entraient dans ces cases, avaient été renié ; que les femmes de la famille n’étaient jamais prises au sérieux, ou valorisé au même titres que les hommes. Et le meneur, était cet oncle, source du malaise sans nom, avec ses œillades gênants et ses gestes déplacés. Il avait fallu qu’une autre de ses victimes eu le courage de porter plainte pour que finisse par croire qu’entre lui et la mère de Stella, il ne s’agissait pas d’une infidélité mais d’un crime, un vrai.

C’est le néant, il obscurcit la vie de l’adolescente qui oscille entre torpeur, irritabilité. Elle est morte dans l’âme. Et ce sont les autres qui paient les pots cassés, pour les demi-frères et sœurs, pour les mauvaises langues, pour l’oncle et pour son père. La victime devient bourreau, elle s’intronise à coups de sarcasmes, de rumeurs et de sourires narquois,  bully du collège puis du lycée. Stella les pousse à bout et ne lâche jamais sa proie, pas avant que ce soit elle qui cède la première. L’adrénaline endort toute sensibilité, tout raisonnement, mais jamais bien longtemps. Alors elle recommence même si elle entend une voix qui lui dit d’arrêter. Elle l’a fait taire et s’engouffre encore plus dans l’ombre. Jusqu’à ce qu’un jour, répandre la terreur et l’angoisse ne suffisse plus pour calmer la détresse qui règne dans sa poitrine et n’entraîne que désolation. Il ne semble plus y avoir de fin au bout du tunnel, alors elle tente une autre manière pour l’atteindre. Aujourd’hui, après moultes autres péripéties, après plusieurs séances de psychanalyse, après la reconstruction de sa famille, il ne reste que ce tatouage pour couvrir la trace de son désespoir et pour dire qu’elle a retrouvée l’espoir. Et Personne n’a besoin de savoir, que la personne qu’elle est aujourd’hui, et qui est encore amenée à se métamorphosée, est différente. La part d’ombre est encore là, pourtant ce qu’elle craint ce n’est plus d’infliger à nouveau des souffrances morales ou de se faire du mal à elle-même, mais c’est d’être blessé par quelqu’un d’autre. C’est devenu sa hantise. Néanmoins, elle est forte ;  elle se le rappelle à chaque fois qu’elle pose les iris sur ce papillon monarque.