I
il y avait ces rires innocents qui s'échappaient de tes fines lèvres d’enfant ; moments d’allégresse sur cette petite étale de marché, seule source de revenus de tes parents. et les réminiscences en sont aujourd’hui floues, mais cette sensation d’aise, contrastant avec celle plus pesante du foyer, elle, jamais ne t’a quittée. instants enchanteurs que ceux passés derrière cette échoppe.
vie peu aisée, dont jamais tu n’as souffert ; vie simple dont le peu donné, te satisfaisait.
II
paradis perdu quand le choix a été fait ; partir loin de ton île natale pour rejoindre la capitale trop longtemps abhorrée pour des études dont l’enchantement n’a pas été celui attendu. c’est que le désespoir , c'est fait ressentir, quand ils ont compris que le désir ne sera pas assouvi, car non tu ne deviendras pas cette personne importante pourtant tant souhaitée.
surprises qu'ont été ces facultés lorsqu’elles se sont manifestées ; gamin surdoué comprenant un peu trop vite les exercices de ton niveau. et les classes - deux, ont été alors sautées par volonté propre de tes géniteurs. alors te voilà, toi enfant, entouré de plus âgés ; gamin posé, mais dont la singularité questionne, donc tous s’enquièrent de ta présence à leurs côtés. et la réponse en reste trop souvent la même :
« apparemment j’comprends les choses trop vites » et les éclats franchissant leurs lèvres en ont été trop souvent la réponse. pour toi dont le cerveau marche pourtant trop vite, jamais la réaction n’aura été comprise.
années passées dont la facilité ne s’est en rien étiolée, mais avec la pression, elle, s’est doucement installée. imperceptiblement posée sur tes épaules par ceux ayant compris le potentiel de ces capacités peu communes. et avec s’est accompagné ce sentiment... douce maladie que celle de vouloir faire toujours mieux pour voir s’installer un sourire sur leur visage. et le vice quand lequel tu as plongé s’est lui aussi fait doux, d’abord les cachets pour tenir la distance, puis la marie-jeanne pour calmer le tout… vile qu’est cet engrenage dont aujourd’hui encore tu n’es pas remis, et dont jamais tu n’as laissé suspecter la présence.
III
enfant perdu dans cette ville inconnue, te voilà sans rien ; déception dont la conséquence aura été la perte de tout. tu es nu, sans rien, et ne pouvant compter que sur toi. première fois que tu expérimentes cette sensation qu’est la peur ; angoisse réveillée que seul le peu de verte qu’il te reste réussira à calmer.
économies bénites qui te permettront de trouver un toit sous lequel passé quelques nuits ; jours comptés pour trouver un petit boulot, mais finalement rapidement trouvé, et c’est l’appartement qui sera aussi trouvé dans la foulée. l’enfant que tu été aura su finalement se débrouiller.
IV
contre cette fenêtre donnant sur l’extérieur, la fumée blanche est recrachée doucement ; moment accordé pour terminer cette journée lorsque qu’à côté sa voix te parvient.
« j’tai déjà dit d’arrêter ça ihn kyang ! » éclat qui s’extirpe de tes lèvres quand tes orbes se posent sur sa seule tête sortant de la fenêtre.
« un jour peut-être tu le sais bien. » ses sourcils se froncent, et tu ris à nouveau.
elle est ta bouée dans cette jungle séoulite ; voisine, elle est devenue par la force des choses ton amie. c’est qu’elle t’aura surpris quelques fois en bas de l’immeuble à récupérer ce qui calme tes insomnies. elle t’en touchera un mot, essayera même de t’en défaire - en vain, et malgré l’échec elle est toujours là à tes côtés. c’est qu’elle est gentille cette amie, à te faire rire quand les journées auront été compliquées, à t’écouter te plaindre quand tes pensées s’arrêtent sur tes géniteurs. et la réciprocité est donnée parce que tu l'apprécies finalement beaucoup.
« ihn kyang ?» tu écrases le cône roulé.
« hmmm ? », tu poses ta tête contre la rambarde pour installer tes prunelles sur ses traits.
« tu sais que tu as une belle voix, quand tu chantes ? » tu rigoles.
« aigoo, il te prends quoi à dire ça ? » sourcil haussé.
« yah, t’habites dans une résidence pourrie j’te rappelle ! les murs sont fins tu sais. » nouvel éclat qui franchit tes lippes.
« oui, oui, allez va te coucher au lieu de dire n’importe quoi. » tu t’éloignes de la rambarde extérieure ; mine boudeuse qu’elle doit sûrement affichée et dont tu en connais parfaitement les contours.
« penses-y oppa, tu étudies ce domaine en plus... » et la fenêtre est fermée mettant fin à vos échanges nocturnes…
V
travail opéré après les palabres prononcés ; la réflexion a été longue, mais tu en es arrivé à cette conclusion que pour toi ayant déjà tout perdu, essayer serait faire preuve d’une sûreté certaine, car qui ne tente rien n’a rien ? alors les castings ont été recherchés, et les échecs essuyés ; tous confirment que ta voix a du potentiel, mais tous s’accordent aussi à dire que tes mouvements sont bien trop maladroits. alors, la décision a été prise que de t’entraîner ; t’inscrire à un club pour apprendre à maîtriser ce corps malhabile, dans ce but d’obtenir ce que tu désires aujourd’hui plus que tout.
accomplissement quand enfin un retour positif t’es donné ; corps encore bancal mais dont les gestes entrainés t’auront permis d’obtenir le graal.
et les années sont passées, et qu’elles auront été intensives ; jongle permanente entre les études, le boulot et les entraînements, mais tu ne regrettes en rien l’investissement consacré à ce but, car le travail acharné t’offrira la chance de participer à ce survival fomenté par ton agence. être toi-même par tous les moyens, voilà l’image que tu auras tentée de refléter pendant les quelques mois de semaines, et dont la place finale te fera dire que tu auras eu raison. séduction délicate du public, dont les commentaires élogieux sur ton physique te vaudront le surnom de pretty boy ; mais c’est le statut que l’agence décidera de t’octroyer qui flattera bien plus ton ego - leader
rôle peu facile quand les personnalités sont si peu apprivoisées ; observateur, tu marches malgré tout sur des œufs. difficile de contenter tout le monde quand le groupe est composé de huit garçons tous plus différents les uns que les autres. alors, tu sais ta chance de pouvoir fédéré, d’être écouté et surtout entendu. tu sens aussi la pression qui t’incombe, mais tu l’embrasses avec fierté, car ces sept bonshommes sont à présent ta nouvelle famille.
VI
dernier regard sur ce bâtiment qui t’aura vu grandir dans la capitale ; pincement au cœur de quitter ce lieu chargé de souvenir, tout comme cette petite tête dont la voix ne te parviendra plus. impossible de partir sans un dernier clin d’oeil alors un simple autographe est laissé, accompagné d’un espoir qu’un jour il vaudra cher.
porte poussée de ce dortoir partagé ; tu fais partie des derniers alors la chambre octroyée sera celle avec le maknae.
« j’prends le lit du haut ça te va ? » et alors que le sac s'apprête à être posé, le plus jeune vient s'exprimer.
« non j'lai pris ! mais celui du bas est libre du coup ! » tête hochée, et langue mordue quand les politesses ne sont pas respectée.
« suho, fait attention d'utiliser la forme polie... » le ton est calme, le conseil est simplement avisé, et le sac est alors posé sur le lit du bas..