I. 28/09/99. c'est ta date de naissance, t'es né dans un hôpital de Séoul dans les bras d'une femme épanouie. en grandissant, tu aurais pensé vivre l'enfance parfaite - t'étais un gamin sûr de toi, tu reculais devant rien. mais la vie ne pouvait pas être aussi clémente, n'est-ce pas ? c'est quand tu avais quatorze ans, qu'on t'a annoncé que ta mère était gravement malade et qu'elle avait besoin d'un traitement à vie... autant dire que tu n'as pas pris la nouvelle à la légère. tu te démenais à l'école, tu ramenais des notes merveilleuses - tu rendais ta mère fière de toi. tu étais la fierté des Kim.

II. c'est uniquement un an après qu'un événement t'a poignardé le dos, la mort d'une précieuse amie et ces funérailles que tu avais premièrement refusé d'y assister - parce que tu ne voulais pas que tes cinq autres amis ne voient ton piteux état. tu as fini par y aller, parce que tu savais que tu allais regretter de ne pas avoir été une dernière fois là, pour elle. t'avais 15 ans, ce jour-là. tu t'en souviens, parce que la pluie se mélangeait à tes larmes.

III. après ta détention, t'as appris de tes erreurs. tu as voulu rattraper le temps perdu et te racheter auprès de ta mère - qui n'était pas fière de cet épisode. mais elle a su accepter le passé et tourner la page, appréciant tes efforts et te donnant une nouvelle chance au sein de la famille. mais apparemment, ta famille semble être maudite. ton père ne supportait plus de payer les factures médicales de ta mère et de ne plus réussir à finir les fins de mois avec les placards remplis ; alors il s'est enfui. te laissant, toi et ta mère dans cette maison négligée. t'as alors abandonné tes études pour subvenir aux besoins de ta mère - tu avais déjà un boulot à mi-temps, mais ça ne payait pas aussi bien que le boulot de ton père. ou est-ce que tu devrais le considérer encore comme ton père ?

IV. chaque matin, tu te lève à quatre heure pour pouvoir t'occuper de la maison et de ta famille avant d'être absent durant le reste de la journée ; tu prends une douche, tu prépare les médicaments de ta mère puis le petit déjeuner, tu nettoies un peu avant qu'elle ne se lève à son tour et enfin, tu pars de chez toi avec un café à la main. sans même avoir mangé. toi. le fils. tu remplis le rôle que ton père n'a pas réussi à remplir. ta mère te répète que tu n'as pas besoin de te démener ainsi pour elle, que tu devrais t'occuper de toi… mais si tu ne t'occupes pas de ta mère, qui le fera ? tu ne peux pas te permettre de perdre la seule personne qui te reste dans cette famille maudite.

V. même si la vie semble t'en vouloir pour une raison inconnue, tu n'en a pas perdu la joie de vivre. tu es fier de tout ce que tu as fais - si on oublie la case prison pour mineurs - et tu compte continuer à t'en vanter. moustique un jour, moustique toujours.

VI. tu fais fièrement parti d'une bande d'orchestre, peu connue, mais les salles sont assez remplies pour augmenter ta confiance en soi et ta fierté. tu sais jouer de cinq instruments ; la guitare, le piano, la clarinette, le violon et la harpe. Ayant été initié dès ton plus jeune âge aux merveilles de la musique - ta mère, elle, était une violoniste très connue à son époque. ça en fait ta fierté et quand tu étais gosse, t'arrêtais pas de t'en vanter auprès de tout tes amis.

VII. cependant ton boulot au sein de cette bande d'orchestre ne paye pas assez pour les factures médicales ; c'est pourquoi tu n'en vis pas pleinement. tu as beau vendre des sample à des compositeurs plus ou moins connus, ça ne paye toujours pas assez. tu es alors obligé de travailler dans des domaines que tu n'aimes pas. hôte de caisse, livreur, garde de nuit et tu en passe... ton CV doit être plutôt rempli. tu ne sais pas si tu peux t'en vanter ou pas, cependant...

VIII. contrairement à tout tes amis, tu as arrêté de grandir depuis tes 17 ans. tu fais tout bonnement 1m67 et certains aiment aller taper dans ta fierté - tu es petit, alors t'es forcément un putain de chihuahua à leurs yeux. ça te fais clairement chier, alors t'as acheté des semelles de chaussures qui pourraient t'aider à tricher de trois centimètres. ouais, tu te mens à toi-même... au lieu d'assumer ta taille de nain.

IX. une conquête t'a quitté sous prétexte que vivre encore dans la maison de tes parents, c'est carrément nullos. ça a mis un coup dans ta fierté, mais tu t'es rappelé que cette personne était vraiment stupide - parce qu'elle savait la raison pour laquelle tu n'as pas encore quitté le cocon familial... alors dire que c'était stupide de t'occuper de ta mère malade, voulait en dire long sur son qi général.

X. la maladie de ta mère ne l'empêche pas de vivre pour autant. alors, vous faites souvent des sorties quand l'argent se présente dans vos portefeuilles ; très souvent, tu l'invites au cinéma puis au restaurant. parce que ça t'insupporte qu'elle ne puisse pas vivre comme la jeune femme qu'elle était avant que votre famille ne soit maudite… si elle ne l'était pas avant, considérant le genre d'homme qu'est ton "père".

XI. ces derniers temps deviennent plus difficiles pour toi. tu aurais pensé que tu te serais habitué, après toute ces années à te lever tôt et te coucher tard. mais non. ton corps semble s'affaiblir sous les corvées incessantes... tu en es venu à prendre soin de toi, pour la première fois de ta vie. tu as pensé à ta santé et tu es allé faire des checkups, tu as attendu les résultats de ton médecin traitant après plusieurs mois.

XII. les résultats sont enfin arrivés après quatre mois d'attentes - c'est en ce septembre que tu as appris que la malédiction t'est aussi tombé dessus. la vie n'en avait pas terminée avec toi. non. loin de là. elle voulait te voir cracher du sang, elle voulait te voir t'écrouler et succomber à tes efforts. c'est dans ce bureau, que ton médecin t'a annoncé la mauvaise nouvelle. un cancer s'est installé en toi et ça ne semblait pas être un petit cancer de passage. c'était comme si le médecin t'avait mis une claque via ses paroles, tu aurais cru ne plus savoir respirer à cet instant... pour la première fois de ta vie, tu as craqué devant quelqu'un. tu as laissé dévaler tes larmes sur tes joues habituellement sèches, alors que des centaines de questions traversaient ton esprit. si tu succombes à ce cancer, est-ce que ta mère pourra survivre sans toi ?

XIII. tu as tenté de reprendre contact avec ton père, pardonner le passé et enterrer la hache de guerre... mais il semblerait que ton paternel ait oublié ton existence et celle de ta mère, puisque tu l'a croisé par hasard dans un centre commercial. il était accompagné d'une femme et de deux enfants. putain, il semblait bien remplir son rôle de père avec une femme et des enfants en bonne santé.

XIV. ça fait maintenant quatre mois que tu réfléchis sur ton probable destin. devrais-tu le dire à tes proches et te battre avec eux à tes côtés ou jouer l'âme solitaire dont tu avais pour habitude jusqu'à aujourd'hui ? tu te sens mal de le cacher, mais en même temps, ta fierté te dit qu'il vaudrait mieux ne rien dire si tu ne veux pas être vu comme un maillon faible. tu as toujours eu la tête haute, mais plus les jours passent, plus elle semble s'abaisser. tu es persuadé que tu vas survivre à cette épreuve, t'as toujours été optimiste... mais si il s'avérait que le cancer gagne, est-ce que tes proches te détesteront pour l'avoir caché ?

XV. puisque tu ne sais pas ce que l'avenir te préserve, tu as posé de nombrables candidatures à des maisons de disques. tu as toujours voulu devenir un grand compositeur et un grand musicien. tu es un leader dans l'âme, tu as besoin de contrôler ta propre carrière... et ce n'est pas ce que tu vis en tant que violoniste dans l'orchestre dans lequel tu es. ce sont tes vœux que tu réaliseras avec le temps qu'il te reste... qui sait ce qu'il adviendra.