⊱ histoire

05.11.2001

Les cris perturbent la quiétude de cette soirée d’automne, terme d’une grossesse qui met au monde la petite dernière, une petite princesse, seule fille parmi la petite bande de garçon, et pourtant, ça ne va pas les empêcher de s’amuser ensemble à l’avenir. Déjà, elle se fait entendre, pendant de longues minutes, peu décidées à dormir, maintenant qu’elle est là. Agité fut la nuit, mais ça n’enlève pas l’euphorie, ni l’accueille de sa petite bouille. Après tout, madame Chae avait attendu cette venue, pour avoir une partenaire féminine dans cette demeure agitée, une petite poupée à habiller et choyée, dans le plus pur esprit de demoiselle, bien qui sera difficile, que la petite ne copie pas sur les plus grands, faisant fi de leur sexe opposé et des goût qui devraient différer.

Et tu t'appelleras Moon Shin, toi qui est née sous la pleine lune.

07.09.2008

Quand sonne la fin de l’heure d’étude, tout le monde sort dans la cour, pour s’aérer l’esprit, et la petite Moon ne fait exception, fièrement, ses pas la guide jusqu’au soleil et aux cris de ses camarades. Et elle s’amuse avec les filles à bavarder de tout et de rien, jusqu’à que les rires plus loin l’attire, gamine curieuse, elle regarde le ballon ovale se faire disputer, elle ne comprend pas trop, mais elle aussi elle veut jouer. Après tout, les garçons ont l’air de s’amuser, même s’ils tombent parfois par terre, et parfois se crient dessus. Alors, elle essaye la petite, mais on lui dit non à la gamine qui ne comprend pas, qui essaye encore et encore, malgré les refus.

Tu peux pas jouer avec nous, t’es une fille.

Incompréhension encore, elle qui vit dans un monde de garçon, tu n’as pas vraiment peur de jouer à des jeux de gars, et ils refusent encore et encore. Vexée, la petite, elle retourne s'asseoir, et à défaut de pouvoir s’amuser, elle se donnera à fond dans les cours, première de la classe, juste leur clouer le bec, quitte à jouer la petite fille exemplaire, à jouer à énerver les petits-fils modèles qui doivent tous être les meilleurs, quitte à devenir la bête noir de la classe, et à finir son primaire seul, à ramener des bonnes notes et faire comme si tout aller bien.

2012

Qu’ils sont beaux les bracelets, qui dans la vitrine reflétée l’été, ça lui a presque piqué les yeux, à la gamine. Neuf ans, et elle reste plantés là, essayant peut-être la télékinésie. Plus loin, les plus grands se chamaillent, pendant que les parents boivent une boisson noir et amer dont elle n’aime pas l’odeur. Elle observe les bijoux, petite curieuse qui se dit qu’ils iraient bien à leur poignet. Et elle aurait juste pu repartir, et utiliser ses quelques pièces pour quelques gourmandises, mais sur le bitume, elle étale sa maigre fortune, et sur ses doigts, elle compte le total, espérant en avoir assez. Déception, dans sa main, assez pour quatre d’entre eux, pour le dernier, elle n’a guère qu’un peu plus de la moitié, et elle songe à faire cadeau des quatre aux plus grands, reliant à elle juste le geste de donner les bijoux. Heureusement, monsieur Chae voit la moue contrariée, et bientôt se déleste du montant restant, éclairant le visage de la petite, un câlin, et elle disparaît dans la boutique, se séparant de son argent pour les vacances, récupérant ce qui avait accaparé son attention. L’air déterminé, la voilà à distribuer les petits bijoux à sa fratrie, finissant par enfiler le sien, légèrement trop grand pour elle, mais le sourire est triomphant.

Et si vous le perdez, vous serez maudit, c’est le lien de la famille.

Et elle menace naïvement la petite, quand d'autres auraient fini par abandonner le bracelet, ceux-ci n’étaient pas destinés à disparaître. La gamine, elle voulait juste dire, je t’aime à sa façon.


22.08.2019

Le soleil, il trône imperturbable au milieu du ciel, le brouhaha de la foule se fait incessant dans l’atmosphère caniculaire, c’est insupportable autant que fascinant, en cette journée qui mêle joie et déchirement. Les bagages sont traînés, dans un bruit sourd et régulier, et les voix des parents passent par-dessus, rappelant les épisodes d’une vie qui avait déjà bien débuté. Moon les écoute, même s’ils radotent, l’air nostalgique des départs sont présent, lui rappelant les départs précédents, ceux de ses aînées qui avaient pris leur envol avant elle, et pour la dernière fois, les Chae amènent leur enfant pour la première fois à la gare, pour que celle-ci commence sa vie d’adulte. Le rire qui s’échappe, le temps qu’il leur reste à discuter, dans quelques minutes, ils devront se dire au revoir. Elle aime sa ville et sa vie ici, mais l’astre à besoin d’elle aussi commencer à ne plus dépendre des autres. Elle ne veut plus refléter les autres, mais briller par elle-même, dans ce monde trop grand et si petit à la fois.

Je reviens aux vacances.

Promesse faite, lieux de rendez-vous perpétuels d’une famille qu’elle chérie. Elle observe la ville qu’elle délaisse, et elle sourit quand les rires d’enfants retentissent, ça lui rappelle une jeunesse dorée, comme un au revoir chaleureux, quelques accolades et finalement, les talons claquent que le sol du wagon, bousculé parfois par d’autres voyageurs, elle se glisse dans les rangs pour rejoindre sa place, et bientôt sa main s’agite devant la vitre. Elle a hâte comme elle appréhende, mais elle est fière, la petite, d’aller voir la capitale et ses mille couleurs, et aussi, c’est là-bas qu’elle retrouvera ses aînés. Les doigts qui jouent nerveusement avec le bracelet à son poignet, lien indéfectible, d’une famille unie. Elle se demande comment sera sa vie, là-bas dans la capitale.