TW : pensées suicidaires, mutilation, alcool
Les pensées qui vagabondent ne cessent de ressasser ce moment en présence de Hyunki. Déjà, Daesung ne pensait jamais le revoir. Un deuil qu'il n'aurait sans doute jamais pu faire, de toute façon. Néanmoins, c'est totalement par le fruit du hasard qu'il a recroisé son chemin et il avait, naïvement, cru que ça pouvait être un signe du destin. Enfin, c'était sans compter sur les paroles qui lui ont été servies et qui ont un peu miné son moral. Il ne ressent plus rien. Une part de lui ne veut pas y croire, tandis que la seconde moitié ne peut empêcher les mots de tourbilloner dans son esprit fragile. Gamin en manque d'amour et d'affection qui les recherche désespérément partout où il le peut. Au risque de se faire du mal dans la manoeuvre, malheureusement.
Cependant, aujourd'hui est une journée spéciale qui le rend terriblement nerveux. C'est le jour qu'il a choisi pour passer aux aveux. Sa chimie avec son frère en tant qu'ami est belle et il s'en voudrait de passer à côté de cette révélation. Il aimerait pouvoir le considérer comme ce qu'il est réellement, plutôt que comme un simple ami. Car dans son coeur, Daesung nourrit un amour fraternel envers lui et vu leur bonne entente, il ne peut que bien prendre la nouvelle, non? Il l'espère sincèrement. En ce moment, il est probablement tout ce qu'il lui reste. En-dehors de lui, il n'a pas vraiment de famille, car ses parents n'ont jamais montré une seule once d'affection pour lui. Enaë ne fait malheureusement plus partie de sa vie, même s'il meurt d'envie de reprendre contact avec lui et maintenant, Hyunki le repoussent également. Qui lui reste-t-il, à cet enfant perdu et apeuré?
Certes, il possède quelques amis se dénombrant à l'aide des doigts d'une seule main, mais il n'est pas assez proche d'eux pour leur quémander l'attention qu'il souhaite ardemment au fond de lui. Une cigarette vient rejoindre ses jolies lèvres pour le laisser inhaler sa nicotine toxique afin de retrouver un certain calme. Daesung est à moitié conscient que cette addiction n'est qu'une simple béquille pour l'aider à gérer son anxiété lorsque nécessaire. Elle l'aide à retrouver une certaine contenance tandis qu'il approche du lieu de rendez-vous. Ils sont sensés se retrouver à plusieurs pour sortir, comme la pénombre recouvre déjà le ciel. Daesung espère pouvoir l'accrocher un peu avant que tout le monde n'arrive pour lui dire son terrible secret.
Il arrive donc avec une bonne avance et après deux ou trois minutes, c'est bien son frère qui arrive le premier sur les lieux. Un sourire vient ourler ses pulpeuses alors qu'il écrase le mégot de sa cigarette contre le mur de briques le plus prêt et le jeter dans la poubelle. Il ne fait pas partie de ses fumeurs qui lancent leurs mégots au sol pour l'écraser du bout du pied et l'abandonner à son sort. Il n'est pas trop pour la pollution - de ses poumons, oui, mais pas de leur très chère planète. "Daeho-hyung, salut!" Salutations faites, le plus jeune se racle la gorge pour en chasser le tremblement potentiel dû à sa nervosité revenant au galop. "Eh, dis... Je voulais te parler d'un truc..." Expression intriguée étire le visage de son aîné. "Quoi donc?" Comment révéler le tout, en vérité? Lui dire simplement qu'ils sont frères? Lui dire qu'il l'a approché simplement, car il est lié à lui par le sang? Il écarte immédiatement cette perspective, puisqu'elle est dévalorisante. Même s'il n'avait pas su que Daeho était son frère, il se serait lié d'amitié avec lui tout de même. Leurs caractères s'accordent trop pour que ce ne soit pas le cas.
"Euh, bah, tu vois... Il se trouve que... Je suis ton frère." Le silence plane pendant de trop longues secondes, mais Daesung se dit que c'est le temps nécessaire pour que l'autre digère l'information. "Quoi?" L'architecte vient frotter sa nuque d'embarras et détourne le regard une seconde. "Nous sommes frères biologiques et-" "Non, j'ai bien compris, mais t'as pas cru bon de me le dire avant??" "C'est que je savais pas com-" "Non, tu sais quoi? Dis rien de plus. Je ne veux pas d'attaches avec ma famille biologique ; elle m'a abandonné. Tu peux aller te faire foutre, Daesung. Nous ne serions jamais devenus amis si j'avais su." "M-mais-" "Non, mais ta gueule et dégage, j'veux plus te voir." Du dégoût. C'est ce qu'il dénote sur les traits de Daeho. Le cadet, pour sa part, reste complètement interdit, pendant que son coeur se serre douloureusement. Pourquoi ce rejet? "Tu m'donnes envie de vomir pour m'avoir approché juste parce que je suis ton frère." Mais? Sa douleur émotionnelle devient si forte qu'il finit par la ressentir physiquement.
Avant de s'effondrer devant cet être abject, Daesung tourne les talons et prend la fuite. Pile un peu avant que les larmes ne viennent dévaler ses joues d'albâtres. Qu'a-t-il fait pour mériter tel traitement? Il pensait sincèrement que tout se passerait bien vu la bonne entente qu'ils entretenaient. Il ne pouvait pas plus se planter... C'est avec un sanglot qu'il n'arrive pas à retenir qu'il rejoint sa moto pour enfoncer son casque sur sa tête. Au moins, ça empêche les autres de le voir si pitoyable pour quelque chose de si anodin. Après tout, ils n'ont pas réellement noué de lien... N'est-ce pas? C'était seulement dans sa tête. Encore une fois, Daesung s'est laissé bercer par ses illusions créées de ses désirs les plus profonds. Il enjambe le véhicule pour y faire ronronner le moteur et partir à toute vitesse dans les rues de Séoul.
Conduite dangereuse et rapide finit par le guider chez lui où il range sa précieuse bécane, retire son casque et grimpe trois par trois les marches menant à son penthouse. Une fois enfermé à l'intérieur, il s'effondre complètement. Ne peut-on réellement pas l'aimer juste un peu? La solitude lui fait du mal et Daesung ne cherche pourtant qu'à être
Ce sont probablement quelques heures qui se passent et qui ajoutent les cadavres de bouteilles à la belle collection qui peuple son lieu de vie. Complètement arraché à la réalité, Daesung laisse le mal qui le ronge lui entailler la peau des avant-bras. Pour la première fois de sa vie, il a envie d'en finir. Mais il ne réalise pas que ce n'est pas sa véritable pensée, car plus que tout, il tient à son existence. Toutefois, la douleur qui l'envahit lui brouille l'esprit. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle son téléphone se retrouve dans sa main, affichant le numéro de son meilleur ami : Enaë. Détresse qui le pousse finalement à cliquer sur le petit téléphone vert pour l'appeler. Tant pis si cela fait trop longtemps qu'ils n'ont pas échangé. Tant pis si, lui aussi, il décide de lui tourner le dos. Ça ne voudra dire qu'une seule chose : il ne mérite pas de continuer.