Depuis votre dispute, quelques jours se sont écoulés. Pourtant, alors que tu te trouves devant l’immeuble de l'agence, les mots écrits par Nao, résonnent encore très clairement dans ton esprit. Comme un horrible écho dont tu aimerais te défaire ; Quelqu’en soit le prix. De même que ceux de ton meilleur ami, véritable ange tombé du ciel, qui a passé ses quatre derniers jours à essayer de te faire entendre raison et de te pousser au dialogue avec l'idole. Une tâche peu aisée, tu dois bien l’avouer. Sans lui, probablement que tu aurais tout abandonné ; Que ce soit ta relation amoureuse, ou ce travail, qui te lie à de trop nombreux souvenirs. Sans lui, sans doute que tu ne te tiendrais pas face à cet immeuble, qui a le pouvoir de te rendre terriblement anxieux.

Pourtant, bien que ce ne soit pas l’envie qui te manque, tu ne peux pas faire marche arrière. Cette conversation, qui semble te tourmenter un peu plus, à mesure que tes pas te rapprochent de Nao, tu ne peux pas t’y soustraire. Pas cette fois. Sans elle, il est certain que le gouffre s’est créé entre toi et l’idole, qui partage ta vie depuis plusieurs mois, ne fera que se creuser un peu plus. Alors, après avoir hésité pendant de longues minutes, tu décides d’entrer. Ayant pris les escaliers afin de retarder encore un peu le moment où tu te retrouveras devant Nao, c’est un peu à bout de souffle, que tu finis par arriver devant la porte de son dortoir. Pressant la sonnette, la porte s’ouvre très rapidement, dévoilant l’un des bandmates du garçon, qui semble surpris de ta présence. C’est qu’en général, à part leur manager, les garçons n’ont pas l’habitude de recevoir de la visite. Et encore moins, la tienne. Cependant, malgré la curiosité évidente qui se lit sur son visage, la chambre de Nao t’est indiquée, sans qu’aucune question ne te soit posée. Une véritable aubaine.  

Soupirant, alors que tu es face à la porte derrière laquelle se trouve ton petit ami, tu te contentes de frapper doucement. « Nao ? C’est ... Enaë. Je peux … Entrer ? » Demande faite d’une voix étrangement calme, alors que tu attends patiemment, une main posée sur la poignée, que le garçon t’invite à entrer dans sa chambre.

Les quatre derniers jours ont été infernaux. Entre la douleur de son petit coeur et celle de sa cheville, Nao n'a pas vraiment eu de répit. Il ne sort généralement pas de sa chambre, sauf lorsqu'il a trop faim. Il n'y a qu'une journée où il a déserté ; Minwoo l'a emmené à la plage, puis au restaurant, mais l'idole n'a pas mangé plus que ça, trop englué dans ses pensées. Il n'a sincèrement pas dû être de bonne compagnie et il se sent désolé pour son aîné. Les nuits sont agitées et peuplées de cauchemars en tous genres qui le maintiennent éveillé, creusant les cernes sous ses yeux. Aucun maquillage n'a établi domicile sur son joli faciès, non plus. En vérité, le garçon se laisse dévorer par ses démons... Et il n'essaie même pas de les empêcher de lui faire du tord.

Aujourd'hui, l'un de ses bandmates l'a poussé à aller se doucher et même cette simple action, Nao la trouve difficile. Munis de ses béquilles, il est resté un moment planté devant la douche à se demander comment il fera pour exécuter ce simple geste du quotidien. Au bout de presque une heure, il a fini par en sortir et cogner son pied contre le comptoir en se retournant. L'idole ne retient même pas la complainte de douleur sonore qui lui échappe, ses yeux se remplissant de perles salées. C'est bien sa veine, il fallait absolument qu'il empire sa blessure dans la manoeuvre. Il reste un moment immobile, tête baissée à retenir son souffle sous la douleur qui le traverse. Ses mains serrent avec force ses béquilles et son corps tremble légèrement. Après quelques instants, il finit par terminer de se sécher et enfiler son pyjama foncé. La cheville dans son attelle le fait souffrir et Nao décide d'aller se chercher un sac de glace pour soulager l'enflure qui apparaîtra sûrement au bout de quelques temps.

Le temps de s'exécuter et il retourne à sa chambre, ferme la porte et s'assoit sur son lit pour constater que le tout a bien pris des proportions inquiétantes. Le sac froid posé à côté de lui, le gamin tente de retirer l'attelle devenue trop serrée. Geste qui le fait souffrir et émotionnellement, l'enfant s'effondre. Il a réellement tout gâché, cette fois. Enaë ne va pas revenir. Ça fait d'autant plus mal de se dire que c'est sa faute à lui si tout est ainsi entre eux deux. Le japonais a patiemment attendu son retour, mais en vérité? Il ne sait même pas quand son petit-ami viendra le voir pour discuter. En fait, il ne sait même pas s'il a encore le droit de l'appeler ainsi... Un sanglot lui échappe à l'instant-même où on toque à sa porte. Une voix lui parvient et fait redoubler ses larmes amères. Il n'arrive plus à voir ce qu'il fait et finit par prendre sur lui pour répondre sans que sa voix ne tremble trop. "T-tu peux... entrer..."

Attendant patiemment que Nao t’autorise à rentrer dans sa chambre, une voix plutôt grave - et ne ressemblant définitivement pas à celle de l’idole, se fait entendre un peu plus loin. « Entre sans lui demander. Ça fait plusieurs jours qu’il reste enfermé dans sa chambre, et qu’il refuse qu’on y entre … Enfin ? Je dis ça, mais tu fais ce que tu veux. La porte est sûrement moins déprimante, que Nao. » Te contentant de t’incliner légèrement, afin de remercier le bandmate de ton petit ami pour ce précieux conseil, tu te sens soudainement coupable. Affreusement coupable, même. Si le garçon que tu aimes, en est au point de s’isoler dans sa chambre depuis des jours, et de paraître terriblement déprimant aux yeux de ses colocataires, c’est définitivement de ta faute. De ta seule et unique faute. Soupirant, clairement contrarié par cette pensée, tes songes ne peuvent pas s’empêcher de revenir à cette conversation, que tu as eue avec ton meilleur ami au cours de ce long week-end ; Ne sous-estime pas Nao, il souffre peut-être autant que toi. Des mots qui n’ont jamais raisonné aussi fort qu’en cet instant présent.

Finalement, après un court instant, c'est la voix de ton petit ami, qui s’élève afin de t’autoriser à entrer dans sa chambre. Une réponse qui surprend l’idole, restée non loin. « Oh … Tu es privilégié à ce que je vois ! » Une exclamation lancée et à laquelle tu ne souhaites pas donner suite, alors que tu t’empresses de pénétrer à l’intérieur de la chambre de Nao. C’est que ta priorité, est ailleurs en cet instant présent. Refermant la porte derrière toi, tes prunelles se posent immédiatement sur la silhouette du plus jeune, qui se tient assis sur son lit. Le scrutant rapidement, tu remarques cette poche de glace, posée à ses côtés, ainsi que l’attelle, qu’il semble avoir ouverte. Alors, en faisant abstraction de cette horrible mine, qui habite son si joli visage - d’ordinaire si resplendissant, tu t’avances sans un mot, jusqu’à t’accroupir devant lui. Posant l’un de tes genoux à terre, afin d’être stable, l’une de tes mains s'installe très délicatement sous sa cheville blessée, que tu finis par libérer de l’attelle, dans le but de pouvoir y poser - toujours avec la même douceur, la poche de glace, qui était posée à côté de Nao. Effectuant ce geste dans le plus troublant des silences, seul le froncement discret de tes sourcils, semble trahir à quel point, tu te sens inquiet, maintenant.

Quelques instants plus tard, après t’être assuré que la glace est bien positionnée sur la cheville de ton aimé, ton regard finit par se relever. Gardant tes mains autour de la cheville de Nao, pour ne pas que la poche tombe, tu secoues la tête légèrement, afin de dégager les mèches de cheveux de ton visage. « Ce n’est pas si terrible que ça ne parait … C’est bien ce que tu as écrit … N’est-ce que pas ? » Contrairement à ce que le garçon a annoncé par sms, son articulation ne te semble pas dans la meilleure des formes. C’est même tout le contraire. Pendant que tu appliquais la glace, tu as bien remarqué l’énorme gonflement, et l’hématome qui colore sa peau si pâle, d'ordinaire. « Il me semble avoir lu quelque part, que c’est mieux de laisser ta jambe à plat pour aider à diminuer le gonflement … Tu devrais peut-être t’allonger … Je vais t’aider pour ne pas que la glace tombe … Enfin, si tu le permets ? » Bien que tu sois terriblement inquiet, et prêt à accéder à la moindre de ses demandes, dans le but de l’aider, tu préfères lui demander la permission, plutôt que t’imposer. C’est que pour le moment, et vu l’état de votre relation ces derniers jours, tu n’es pas certain que ton petit ami soit enclin à agir comme si rien ne s’était passé, sous prétexte que tu t’inquiétes soudainement pour sa cheville. Après tout, comme tu l’as déclaré un peu trop facilement ; Si lui, se moquait de ce que tu faisais, toi, tu te moquais bien de sa blessure. Des mots prononcés sous un accès de colère, que tu regrettes amèrement. Surtout, maintenant.

Nao ne s'est sans doute jamais senti aussi pitoyable de toute sa vie qu'en cet instant. C'est que l'amour, ça fait mal. C'est merveilleux, il a pu en témoigner jusqu'à maintenant et notamment pendant leur séjour sur l'île de Jeju, cet été, mais il comprend que c'est un sentiment capable de détruire complètement. Et jumelé à la culpabilité, il fait un vrai carnage dans son coeur. Premier amour qui n'est pas facile, mais la vérité, c'est que malgré tout, le japonais ne changerait rien à celui-ci. Peu importe s'il souffre, il aime Enaë plus que tout au monde et ne se résoudrait jamais à le quitter si facilement. Sauf si c'est ce que le styliste désire, parce qu'il n'aurait pas d'autres choix que de se plier à ce qu'il veut. Nao, qui met toujours un point d'honneur à reconnaître ses fautes et à s'excuser. Il est certainement encore très jeune et inexpérimenté, mais il a appris à bien se connaître pour mieux pouvoir gérer avec son caractère explosif et imprévisible. Pourtant, cette fois, il est réellement allé trop loin ; raison pour laquelle il se sent si misérable. C'est sans doute la première fois qu'il voudrait pouvoir effacer ses mots, prononcés sous le coup de la colère. Une colère entièrement dirigée contre lui-même qui a due être titillée par sa jalousie incontrôlable. Il est idiot de s'être blessé de façon aussi stupide. Un faux pas et hop, une entorse de la cheville assez sérieuse.

Et évidemment, il faut que son aîné choisisse précisément le moment où il s'effondre pour apparaître. Japonais qui souffre à un tel point qu'il se demande s'il finira par guérir. La porte s'ouvre et interrompt ses pensées éparpillées. Par réflexe, Nao lève la tête, mais la détourne aussitôt en voyant le visage de celui qu'il aime. Il est terrifié par ce qui s'en vient, son palpitant s'est même furieusement affolé et une boule s'est formée au creux de son ventre. Aucun mot n'est prononcé tandis qu'Enaë s'avance vers lui. Le gamin ne pense pas un instant qu'il va l'aider, car il lui a très bien fait comprendre qu'il se moquait de sa blessure, à l'image du cadet qui lui a dit qu'il se moquait de ce qu'il pouvait bien faire. Le coeur se serre et il est prêt à empoigner le sac de glace à ses côtés pour lui permettre de s'asseoir, mais le coréen en décide autrement. Posant un genou à terre devant lui, il s'efforce de lui retirer l'attelle, lui arrachant bien involontairement un gémissement de douleur. Néanmoins, une fois son pied libéré, il se sent tout de suite un peu mieux. Il n'a plus la sensation d'avoir une pression constante sur celui-ci. La douceur dont fait preuve son petit-ami lui embrouille les sens, lui qui pensait à tord que ce dernier n'en avait rien à faire. La glace positionnée contre l'enflure qui s'est formée lui arrache un soupir tremblant. Ça fait du bien.

C'est tout de même perturbant d'être confronté à ce silence et Nao ne trouve pas quoi dire. Il sent le regard d'Enaë sur lui et s'il croise ses jolies prunelles l'espace de quelques micro-secondes, l'idole détourne les siens pour ne pas avoir à affronter ce qu'il pourrait constater au fond de son regard. La tête baissée, ses iris se posent sur le tissu bleu foncé qui recouvre ses jambes. "Je... C'est parce que... je me suis cogné..." La voix est faible, peu assurée, comme s'il avait peur de parler et que tout vole en éclats à nouveau. Toujours pétrifié par la peur de ce que signifie ce moment. Par l'anticipation. Aux nouveaux propos du styliste, il se contente de hocher la tête pour lui donner la permission de l'aider à s'allonger. La manoeuvre est délicate ; il ne faudrait pas encore empirer l'état de sa cheville blessée. Nao s'allonge sur son lit et en sentant une nouvelle vague de larmes, il vient placer son bras sur son visage pour cacher ses yeux remplis de petites larmes douloureuses. "Je suis désolé, Nae, j'aurais pas dû te dire ça, c'était pas vrai-" Le temps de pouvoir inspirer correctement à travers le sanglot qu'il ne peut malheureusement pas réprimer. "Je m'en veux tellement de t'avoir fait de la peine... Je m'en fous pas de toi..." C'est exactement tout le contraire, en réalité. S'il y a bien une personne de qui Nao ne se fiche pas, c'est bien d'Enaë.

T’accroupir devant Nao, afin de t’occuper de sa cheville lésée, c’est la seule chose que tu te sens capable de faire. Et définitivement, la première chose que tu devais faire en entrant dans la pièce. Bien que tu aies affirmé ne pas te soucier de l’état de son articulation, la réalité est toute autre, en vérité. C’est que tu sais combien elle est précieuse pour Nao et ses activités de danseur. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle tu as fini par lui envoyer le numéro de Hyunki, le petit ami de Daesung, médecin sportif et urgentiste de profession. Même si tu ne le connais pas encore personnellement, tu sais qu’il s’occupera bien de l’idole. Non pas parce que le plus âgé est fan de son groupe, ou encore parce qu’il est ton petit ami - toi, le précieux meilleur ami du nouvel amour de sa vie, mais bien parce qu'il semble faire partie de ce genre de personnes très consciencieuses au travail. Une aubaine et surtout, l’occasion parfaite d’obtenir un second avis médical. Surtout, maintenant, que tu as vu par toi-même que cette cheville est loin d’être en pleine forme. Qu’importe comment cette discussion finira entre vous deux, que Nao le veuille ou non, tu trouveras le moyen de le traîner jusqu’à l’hôpital. Que ce soit de gré, ou de force.

Le regard posé sur le plus jeune, qui cherche par tous les moyens à éviter ton regard, alors que tu attends une réponse de sa part, tu te sens énormément peiné de le voir dans cet état. Bien que l’idole cherche à se cacher, tu n’es pas dupe ; La façon dont il baisse la tête comme si le ciel lui était tombé dessus, et la faiblesse de sa voix, en disent long. Même un peu trop long. Soupirant légèrement lorsqu’il te notifie avoir cogné sa cheville, la seule chose que tu aimerais faire en cet instant, c’est le prendre dans tes bras. Seulement, tu ne le peux pas. Ou du moins, tu ne t’en sens pas légitime. Comment le pourrais-tu alors que tu as disparu pendant quatre jours, sans prétendre vouloir discuter avec lui ? Alors que tu as déclaré à ton meilleur ami vouloir tout abandonner ? Ou du moins, vouloir abandonner la personne que tu aimes, sans lui laisser l’occasion de se rattraper. Avec du recul, tu te sens terriblement minable d’avoir eu de telles pensées. Est-ce que Nao méritait la violence psychologique, que tu lui as imposée ? Sûrement pas. Personne ne le mérite, d'ailleurs. Et tu devrais être la personne la mieux placée pour le savoir. Alors, même si tu as un nombre incalculable de raisons, qui peuvent justifier ton comportement, cela ne change rien à l'état de ta culpabilité. Dans le fond, tu es sûrement autant coupable que Nao dans cette histoire. Si ce n’est pas plus, même.

Une fois l’accord du garçon obtenu, tu l’aides à réinstaller sa jambe dans son lit, d’un geste toujours aussi délicat. C’est que tu as bien remarqué que chaque mouvement, lui est douloureux. Une constatation qui ne peut pas empêcher ton cœur de se serrer un peu plus. Ou du moins, c’est ce que tu pensais, avant que le sanglot de Nao, se mette à résonner dans la pièce, pendant que tu te redresses sur tes jambes. De nouvelles excuses sont prononcées, alors que l’idole tente de cacher ses larmes à l’aide de son bras. Une vision terriblement douloureuse pour toi ; C’est que voir pleurer la personne que tu aimes, ce n’est pas du tout l’une de tes activités favorites. Et encore moins, quand c’est de ta faute. Bien que tu te sois refusé de l’approcher toute à l’heure, tu décides d’éteindre ta raison ; De toute façon, elle ne t’a rien apporté de bon en ce moment. Laissant ton cœur enfin parler pour toi, tu te glisses rapidement dans le lit de Nao, afin de le rejoindre. Bien qu’il n’y ait que très peu de place, et que tu sois littéralement sur l’arête du lit, cela ne t’arrête pas. Passant l’un de tes bras en dessous de ses épaules, tu finis par perdre tes doigts dans ses cheveux, alors que de l’autre, tu attrapes sa taille, afin de le coller à toi. « Je t’aime, Nao … » Que tu souffles d’une voix toute douce, avant de venir déposer un baiser sur son front. « C’est vrai que tu n’aurais pas dû, mais … Tout n’est pas de ta faute … Je n’aurais jamais dû dire que je me moquais de ce qui a pu arriver à ta cheville, simplement pour me venger de ce que tu avais dit juste avant … » Après tout, même si Nao t’a fait beaucoup de peine, il est vrai que tu y avais été un peu fort toi aussi. « Si tu veux bien, on parlera de tout ça après … Quand tu te sentiras mieux. En attendant, je vais simplement rester là, et te tenir dans mes bras.» Te collant un peu plus à Nao, alors que vous êtes déjà très proche, tu relèves ton visage, afin de lui offrir ta nuque, dans le but qu’il puisse aller y pleurer, sans que tu ne le voies. « Continue de pleurer autant que tu en auras besoin … J’attendrais. Même si ça doit prendre toute la journée, et toute la nuit. » Et même plus, si c’est réellement ce dont Nao a besoin pour se sentir un peu mieux.

C'est difficile d'avoir l'impression que la personne que l'on aime plus que tout cherche à rompre à la moindre occasion. Ou du moins, qu'elle fuit brutalement sans même lui laisser la chance de se rattraper et se faire pardonner. Oui, Nao a dit des mots inappropriés sous l'effet de la colère mêlée à sa jalousie, mais vu l'état dans lequel ça le met, aujourd'hui, il est certain que ce n'est pas une erreur qui se reproduira. Il n'aime pas faire du mal à Enaë de cette façon, ce n'est pas son but. Mais parfois, les peurs prennent le pas sur la raison et c'est ce qui est arrivé. La peur de ne plus pouvoir danser, même si une entorse ne devrait pas lui laisser de séquelles, mais surtout, la peur de voir son petit-ami trouver quelqu'un de largement mieux que lui. Insécurités qui le mitraillent constamment et il tente tant bien que mal de se raisonner sur le sujet. Au fond, Nao n'a pas autant confiance en lui-même qu'il le laisse paraître. Et il aime le coréen probablement bien plus qu'il n'est permis. Rien à voir avec une amourette d'adolescence ; le gamin s'imagine littéralement vieillir avec l'autre garçon. C'est pour ça que c'est aussi difficile.

Le styliste n'a pas trop l'habitude des démonstrations d'affection et pour tout avouer, ça a fini par ajouter à son instabilité, bien qu'il comprenne que leur situation ne le permette pas régulièrement. Néanmoins, c'est constamment l'idole qui part en quête d'étreintes et de caresses et même s'il ne le désire pas, il ne peut empêcher les questions vicieuses de s'installer dans son esprit. Il croit Enaë quand il lui dit qu'il l'aime, parce qu'il se rend bien compte de toutes les petites choses que ce dernier fait pour lui, mais... Il y a quelque chose qui manque. Nao a cruellement besoin d'affection. Tout comme en cet instant, à vrai dire. Un câlin lui ferait sûrement du bien, mais il n'a pas la force nécessaire pour le demander à son petit-ami et il doute que celui-ci ne se laisse aller à l'étreindre. Pourtant, il est surpris par un poids nouveau sur le matelas de son lit étroit. Le cadet se laisse manipuler afin que le styliste trouve une position confortable et ses pleurs redoublent d'ardeur. Enfant fragile qui s'est mis à trembler, mais qui accepte volontiers de se blottir contre son aimé, enfouissant son visage contre son cou pour laisser libre cours à ses larmes salées. C'est qu'un nouveau sanglot vient le secouer lorsqu'Enaë lui dit l'aimer.

Les doigts fermement agrippés au tissu de ses vêtements, l'idole s'accroche à lui comme si sa vie en dépendait. Incapable de prononcer une seule parole de plus, il se contente de l'écouter, puis de se laisser complètement aller à sa peine. C'est différent de pleurer seul et de pleurer dans les bras de la personne qui lui donne cet unique sentiment de sécurité. Le japonais ne connaît rien de son passé et il ne comprend pas non plus pourquoi son aîné lui semble si fermé. Au fond, tout ce qu'il veut, c'est d'apprendre à le connaître pour ne pas se retrouver aussi démuni que ce fut le cas devant leur échange tumultueux. Les excuses prononcées par le styliste lui ont fait un peu de bien. Au moins, il ne fabule plus en pensant être le seul fautif dans cette histoire. Il ne sait pas combien de temps s'est écoulé avant qu'il ne termine complètement épuisé et silencieux dans l'étreinte d'Enaë. Des minutes? Des heures? C'est son reniflement qui le fait s'éloigner pour demander un mouchoir. "Est-ce que... tu peux me donner... un mouchoir... s'il-te-plaît?" Une fois en sa possession, il a à peine la force de souffler pour évacuer ses sinus. Complètement vidé de son énergie, tout ce qu'il voudrait, désormais, c'est dormir, mais il ne peut pas. Il ne veut pas repousser cette conversation. Alors, de retour contre le corps du coréen, pour ne pas croiser son regard, se sentant encore trop coupable, Nao garde le silence quelques instants. "Je voulais pas te faire de la peine... J'étais furieux contre moi-même? Et... jaloux? Je l'ai dis, mais je le pensais pas... Je promets que je vais pas le refaire..."

Même si tu ne l’avoueras jamais, il y a des moments où tu as beaucoup de mal à te reconnaître. Surtout, depuis que Beomsoo est réapparu dans ta vie, obligeant ces souvenirs, avec lesquels tu as tant de mal à vivre, à refaire surface. Et ce, malgré toi. Bien que tu n’aies jamais réussi à les oublier, au cours de ces dernières années, tu as au moins appris à exister avec. Ou du moins, tu as réussi à museler ta peine ; L’empêchant ainsi de dévaster totalement ton âme, et de te pousser vers un gouffre, dont personne ne réussirait à t’extirper. Un répit à la valeur inestimable, dont tu te contentais très bien jusqu’ici. L’arrivée de Nao dans ta vie, a été une réelle bouffée d’oxygène ; Et ce, malgré toutes les fois où vous vous êtes chamaillés. Bien que tu aies eu beaucoup de mal à assumer ces sentiments naissants, qui t’ont donné beaucoup de fil à retordre, tu as fini par les accepter. Pour le plus grand bonheur de Nao, qui a énormément pris sur lui, pour te laisser le temps de réfléchir, et surtout, pour que tu lui offres une chance de te prouver, que tu ne le regretterais pas de le laisser entrer dans ta vie. Une échappatoire inespérée dans laquelle tu aimais te réfugier et te perdre, à chaque fois, que tu avais la chance de te retrouver en sa présence. Ou encore, quand tu avais l’horrible sensation que ta souffrance menaçait de refaire surface. Même si Nao n’en est pas réellement conscient - puisque tu n’as jamais réussi à lui avouer, tu lui seras éternellement reconnaissant d’avoir été la raison de tes sourires, ces derniers mois.

Dans le fond, c’est sûrement la raison pour laquelle tu décides de te glisser dans son lit, pour le serrer dans tes bras. Quel petit ami ferais-tu, si tu laissais la personne que tu aimes, pleurer dans son coin, sans le moindre réconfort ? Définitivement, le plus gros des imbéciles. Et sûrement, le plus gros des menteurs. Déjà que tu as la fâcheuse tendance à te renfermer dans ton coin et à remettre votre relation en question, lorsque vous vous disputez ... Si en plus, tu refuses à Nao un peu de réconfort, lorsqu’il en a besoin … Que lui reste-t-il pour ne pas douter de tes sentiments à son égard ? Loin d’être le plus affectueux des amants, tes je t’aime sont littéralement l’une des seules marques d’affection, que tu lui concèdes. Ou du moins, l’une de tes seules marques d’affection directe. Car, des attentions ? Tu en as. D’ailleurs, tu ne cesses d’en avoir pour lui ; Que ce soit sous le couvert de vos activités communes ou de votre vie privée. Le problème ? C’est que tu passes beaucoup trop de temps à les dissimuler à son regard. Une situation qui pourrait paraître totalement idiote, si la raison qui te pousse à agir de cette façon, l’était aussi. Seulement, elle est loin de l’être ; La peur étant l’un des démons les plus prenants de ton existence, qui ne cesse de guider chacun de tes pas, et surtout, chacun de tes gestes. Que ce soit la peur de perdre à nouveau, la personne que tu aimes, ou la peur que tes parents puissent réapparaître à tout moment dans ta vie, et tout briser sur leur passage, elle ne te laisse aucun répit.  Alors, un peu idiotement, tu t’es mis en tête que garder une certaine distance avec le jeune homme, était ce qui est le mieux à faire pour garantir sa sécurité. Seulement, ce que tu n’avais pas prévu, c’est que Nao puisse souffrir de cet espace laissé entre vous. Une souffrance, dont tu n’as définitivement aucune idée.

Après avoir prononcé tes excuses - qui sont certainement un peu maigre, étant donné la tournure qu’ont pris les événements, tu te contentes de rester silencieux, alors que dans tes bras, Nao continue de pleurer, en s’accrochant à toi. Caressant simultanément son dos et ses cheveux, tu t’efforces de rester de marbre, alors que la vérité, c’est que tu te sens anéanti par la scène qui se joue sous tes yeux. De tout ce que tu as imaginé au sujet de l’idole, tu n’as jamais pensé un seul instant que le garçon serait aussi inconsolable, surtout après l’une de vos disputes. Lui qui se montre toujours si souriant, et insouciant, c’est réellement un choc de le voir si misérable. D’autant plus, en sachant qu’il se trouve dans cet état à cause de toi. Une situation qui te pousse à te questionner. Notamment, quant à la nature réelle des sentiments que Nao éprouve à ton égard. Perdu un peu trop dans tes pensées, tu ne remarques pas que le plus jeune a fini par s’arrêter de pleurer. En vérité, c’est la demande un peu surprenante, qu’il formule, et son éloignement de tes bras, qui te tirent de tes songes. Fouillant dans la poche de ton manteau, avec beaucoup de difficultés, tu réussis à sortir un paquet de mouchoirs, que tu lui offres. Toujours silencieux, tu te contentes d’accueillir une nouvelle fois Nao, lorsque ce dernier se recolle contre toi, et ses explications concernant son comportement. Prenant une grande inspiration, alors que le silence a envahi la pièce durant quelques secondes, tu finis par prendre la parole. « Je sais que tu ne le referas plus. Car vu ton état, je suis presque sûr que tu as dû comprendre la peine que tu m’as faite, puisque j’ai décidé de te rendre la pareille, quand j’ai dit que je me moquais de l’état de ta cheville. » Bien que ce soit totalement puéril, tu n’as pas su t’en empêcher ; Puisque Nao t’a blessé, tu t’es simplement contenté de le blesser, à ton tour. « Même si je peux comprendre que tu sois furieux contre toi-même, j’ai beaucoup de mal à faire pareil concernant ta jalousie ? Après tout, ce n’est pas comme si c’était de ma faute qu’on m’ait pris en photo ? Tu sais comment je suis … Je déteste être remarqué … Et surtout, ce n'est pas comme si j’avais pris une photo avec l’une de ces filles totalement dégénérées, qui hurlaient comme des folles, à chaque fois que quelqu’un passait ? » Laissant échapper un soupir d’entre tes lèvres, tu as bien du mal à camoufler le ton contrarié qui teinte ta voix. « Je sais que tu as fait beaucoup d’efforts ces derniers temps, et ? Contrairement à ce que tu peux penser, je ne te demande pas de changer ? Mais, j’avoue que me prendre des vents, alors que j’essayais de calmer le jeu avec toi … Je n’ai pas trop apprécié. La vérité, c’est que j’ai vraiment eu l’impression que quoique je puisse te dire, tu t’en moquais. C’est pour ça que je n’ai vraiment eu aucun mal à le croire, quand tu l’as écrit en bien grand … » En tellement grand que même une personne malvoyante, aurait eu du mal à le louper.