" Ne vas-tu jamais cesser de nous faire honte? Je ne supporte plus de voir ton visage! " Un verre à pied qui s'éclate contre le mur derrière Ki Hyeon, sa mère est dans une colère noire, et il ne serait pas surpris que le verre n'était pas destiné à s'écraser contre le mur mais plutôt contre son visage. Ce n'est pas la première fois qu'elle s'énerve contre lui à cause de son comportement, mais il ne l'a jamais vu ainsi auparavant. Plus elle s'emporte et hurle, plus sa voix monte dans les aigus, encore un peu et elle risque de dépasser le seuil des 20 khz. L'avantage dans tout ça, c'est que Ki Hyeon ne sera plus capable de l'entendre et que ses tympans cesseront de souffrir, sa tête commence même à tourner, il a cessé de faire attention aux paroles de sa mère. De toute manière, il sait très bien que quoiqu'il puisse répondre, ça risque d'empirer la situation. Ces paroles si dures furent alors les dernières que sa mère lui adressa, il y a maintenant un peu plus de cinq ans.

Ki Hyeon, ça n'avait jamais été le fils modèle que ses parents espéraient tant, contrairement à ses grands frères. Il était le petit garçon intrépide qui courait partout et répétait les injures qu'il entendait à l'école et à la télévision bien qu'il n'en avait pas le droit. Une fois, il avait même renversé la pièce montée lors du mariage d'une amie de sa mère alors qu'il tentait de se cacher sous la table. Ce qui, vous l'imaginez, fut une catastrophe. Ki Hyeon, ce n'était pas non plus le garçon sérieux et assidu, qui travaillait jusqu'au milieu de la nuit, quitte à ne dormir que trois heures, afin d'être premier de la classe et d'avoir le meilleur dossier possible. Non, il s'était toujours contenté d'être dans la moyenne, et ça lui allait plutôt bien. De toute manière, il n'avait pas pour objectif d'intégrer l'une plus des prestigieuses universités du pays, n'importe quelle université ferait l'affaire. L'argent de ses parents lui donnait déjà un avenir, alors pourquoi souffrir en se tuant au travail? En tout cas, s'être fait surprendre à embrasser à pleine bouche le fils des invités dans le salon fut réellement la goutte qui fit déborder le vase. Il semblerait que c'est à cet instant précis que Ki Hyeon passa de fils ingérable que l'on cache au maximum à mouton noir de la famille dont l'on cherche à se débarrasser.

Finalement, quelques jours plus tard, c'est un avocat que Ki Hyeon rencontre. Un homme, payé par sa mère, lui apportant un contrat rédigé par elle-même, et devant s'assurer que le jeune homme signe. Les clauses sont plutôt simples, Ki Hyeon est incontrôlable, il ne sait se tenir correctement et risque de finir par donner une très mauvaise image à sa famille, c'est pourquoi on lui demande de complètement disparaître de la vie de ses parents, mais également de celles de ses frères et sœurs - Il ne faudrait surtout pas qu'il vienne également tâcher la réputation qu'ils commençaient à se construire. Puisqu'il est toujours mineur, c'est chez son oncle, à Séoul qu'il ira vivre désormais. Un oncle que Ki Hyeon n'a vu que lors de très rares évènements, et avec qui il ne se rappelle pas avoir parlé ne serait-ce une seule fois, mais soit, pourquoi pas. Et, le dernier paragraphe de cet accord, sûrement celui intéressant le plus l'adolescent, stipule qu'à condition de se faire le plus discret possible, ses parents continueront de payer sa scolarité, et ce jusqu'à la fin de ses études. De même, ils verseraient chaque mois sur son compte bancaire une somme lui permettant de subvenir à ses besoins jusqu'à ce qu'il devienne financièrement indépendant.
Un tel contrat, c'est assez surprenant. Ki Hyeon prend alors le temps d'y réfléchir avant d'apposer ou non sa signature sur le bas de la page. A-t-il envie de rester au logement familial? Perd-il quelque chose en allant vivre chez son oncle? La réponse aux deux questions est négative. Sa mère semble le détester chaque jour un peu plus, tandis que son père n'ose pas s'imposer et se contente de suivre les décisions de sa femme. Ses frères consacrent tout leur temps à leurs études, et sa sœur est encore petite. En conclusion, personne ne le retient vraiment. Dans un soupir, il signe le contrat. Tout ce qu'il lui reste à faire est d'aller rassembler ses affaires pour partir au plus vite, à la grande joie de sa génitrice, n'est-ce pas?

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Après quelques années passées à vivre chez son oncle dans la capitale, Ki Hyeon peut clairement dire qu'il n'a que très rarement regretté d'avoir signé ce contrat. Il aime tellement Seoul, et a l'impression qu'il ne s'en lassera jamais tant il y a de choses à y faire et à découvrir. Et puis son oncle, eh bien, il est beaucoup plus cool que ce à quoi le jeune homme s'attendait. Il ne lui a jamais empêché de sortir et s'amuser, et ne l'a pas non plus forcé à travailler pour remonter dans le classement de son lycée. Comme le trentenaire le disait souvent, il s'agissait de sa vie, ce n'était donc pas à lui de décider pour son neveu.
A sa sortie du lycée, Ki Hyeon rejoint finalement une finalement l'université pour commencer un cursus dans les affaires publiques et internationales. Il ne sait pas encore ce qu'il fera après ça, s'il ira jusqu'au master ou au doctorat. Il s'est juste dit que ça pourrait être intéressant, sans savoir quel métier exercer après ses études. A vrai dire, ce n'est pas son premier choix. Initialement, Ki Hyeon envisageait de se lancer dans une licence de psychologie et criminologie, mais il fut refusé sous prétexte qu'il n'avait pas le niveau. Surprenant, n'est-ce pas? Pour être honnête, il s'y attendait, mais ce n'est pas pour autant qu'il avait prévu un plan B. Il s'était alors contenté d'intégrer une formation où il restait quelques places, et voilà où il en est maintenant.