Un jour de plein automne, une reine était assise à sa fenêtre encadrée de bois d'ébène et cousait. Tout en tirant l'aiguille, elle regardait voler les étoiles argentées. Cet argent dans la nuit presque noire faisait si bel effet qu'elle se dit : « Si seulement j'avais un enfant aussi brillant que l’étoile, aussi rose que le sang, aussi noir que le bois de ma fenêtre ! » Peu de temps après, un fils lui naquit ; il était blanc comme neige, rose comme sang, ses cheveux étaient noirs comme de l’ébène et dans ses yeux brillait une lueur d’argent. On l'appela Hoshi.
Mais la reine mourut en lui donnant le jour.

Au bout de quelques années, le roi épousa une autre femme, afin d’oublier la peine causée par la perte de la première. Elle était très belle ; mais elle était fière et vaniteuse et ne pouvait souffrir que quelqu'un la surpassât. Elle possédait un miroir magique. Quand elle s'y regardait en disant : « Miroir, miroir joli, qui est la plus importante pour le roi ? » Le miroir répondait : « Madame la reine, vous êtes la plus importante au pays. » Et elle était contente. Elle savait que le miroir disait la vérité.
Hoshi, cependant, grandissait et devenait de plus en plus important dans la vie du roi. Un jour que celle-ci demandait au miroir : « Miroir, miroir joli, qui est la plus importante pour le roi ? » Celui-ci répondit : « Madame la reine, vous êtes la plus importante ici, mais Hoshi est encore mille fois plus important. » La reine en fut épouvantée. À partir de là, chaque fois qu'elle apercevait Hoshi, son cœur se retournait dans sa poitrine tant elle éprouvait de haine à son égard. Elle en avait perdu le repos, le jour et la nuit.

Elle fit venir un chasseur et lui dit : « Emmène l'enfant dans la forêt ! Fais en sorte qu’il commette un crime et ramène le au roi. »
Le chasseur obéit et conduisit Hoshi dans le bois. Mais quand il eut dégainé son poignard pour en percer le cœur innocent d’un marcassin qui passait par là, celui-ci se mit à pleurer et dit : « Ô, cher chasseur, laisse-moi la vie ! Je m'enfoncerai au plus profond de la forêt et ne rentrerai jamais à la maison. »
Le chasseur eut un sourire forcé et dit : « Ce n’est pas son intention, mon enfant ! » Un marcassin passait justement. Le chasseur le tua de son poignard, prit ses poumons et son foie et les apporta à la reine comme preuves des crimes du garçon. Le roi reçu nouvelle des faits et punit le jeune garçon d’une sentence à la hauteur des horreurs qu’il avait commises.

Le garçon passa de nombreuses années brimé par le roi, qui ne pouvait échapper à l’influence néfaste de la reine. Quand, un soir, le roi et la reine rentrèrent chez eux et trouvèrent Hoshi étendu sur le sol, sans souffle. Il le soulevèrent, cherchèrent s'il y avait quelque chose d’empoisonné, coiffèrent ses cheveux, le lavèrent avec de l'eau et du vin. Mais rien n'y fit : le cher enfant était mort et mort il restait. Ils le placèrent sur une civière, s’assirent autour de lui et pleurèrent trois jours durant. Puis ils se préparèrent à l'enterrer. Mais il était resté frais comme un être vivant et ses jolies joues étaient roses comme auparavant. Ils dirent : « Nous ne pouvons la mettre dans la terre noire. » Ils fabriquèrent un cercueil de verre transparent où on pouvait le voir de tous les côtés, l'y installèrent et écrivirent dessus son nom en lettres d'or, en ajoutant qu’il était fils de roi. Ils portèrent le cercueil en haut de la montagne et l'un d'eux monta la garde auprès de lui.

Longtemps Hoshi resta ainsi dans son cercueil, toujours aussi joli. Il arriva qu'un jour un prince qui chevauchait par la forêt s'arrêtât à la maison des nains pour y passer la nuit. Il vit le cercueil au sommet de la montagne. Il dit aux nains : « Laissez-moi le cercueil ; je vous en donnerai ce que vous voudrez. » Le prince fit venir sa garde ainsi que l’un de ses  fidèles médecins, qui déclara que le jeune garçon s’était plongé dans un coma afin de ne plus subir les mauvais traitements du roi. Le prince fit donc emprisonné le roi, le sépara de l’influence de sa reine et envoya le jeune garçon dans une contrée lointaine où résidait un oncle éloigné qui lui fit oublier le mauvais temps qu’il avait passé avec le roi.