October, 2018.
Il sourit devant la scène, tableau presque parfait d’une famille dont les éclats de rires parviennent jusqu’à lui. Le bonheur se lit dans leurs yeux et c’est joli de les voir si unis, jeunes encore au vu des enfants qui courent en cercle autour de leur père. Le cadre est magnifique sous le saule pleureur et il s’accroupit pour mieux  les observer, se voulant discret. Toujours spectateur malgré les émotions qui l’envahissent, de souvenirs qui le traversent et des amertumes qui suivent ; sourires plus discrets. Nostalgie d’une époque qu’il ne retrouvera jamais, mais ni lui ni ses parents ne sont de réels fautifs face à la vie. Ils étaient peut-être voués à se déchirer et lorsqu’il entend la voix de sa mère, il accuse son égoïsme de ne pas accourir pour la soulager de son cœur solitaire. Il entend que son petit ange s’est éloigné aussi, ô Minhee ; il avait pourtant confiance en toi. Il sort de sa bulle lorsqu’on tire sur sa manche, surpris de voir deux gueules d’ange lui sourire et avant qu’il n’ait le temps de réaliser, il se retrouve avec un ballon entre les mains. Il est invité à entrer dans le tableau et en quelques minutes, son rire se mêle aux leurs. Clichés en rafales où il sourit aux côtés de ces enfants qui lui rappellent tant. Et lorsqu’il fait le tri devant son écran, quand les scènes défilent devant ses yeux, il ne se reconnaît pas. Inconnu au sourire grand, vivant. Inconnu qui l’émeut et il sourit, lui aussi.

December, 2018.
Ils sont jeunes et adorables, ils rient en traversant la place et se rapprochent sous les lumières de la ville. Ils ont l’air heureux même si pour lui, le cadre est triste. Il apprécie pourtant de les voir sourire à travers l’objectif, comme un pansement pour son cœur éraflé, perdu malgré la confiance qui l’habite. La nuit est douce, mais son être est rêche même s’il n’est pas seul ce soir. Il a une amie à son bras et lui offre autant de sourires que de plaisanteries, mais son cœur est aussi froid qu’un mois de décembre à Séoul. Il y avait son anniversaire l’autre jour et un message effacé, oublié et entassé avec toutes ses tentatives avortées ; c’était son choix et c’est comme ça. Il est parti et c’est mieux ainsi. Il s’efface doucement du monde des autres, il s’efface doucement ; il voudrait disparaître, simplement. Il observe la vie ; ne veut plus en faire partie. Il rêve pour les autres ; plus pour lui – ne souhaite que leur bonheur ; plus le sien, chemin manqué. Il sourit sur les photos, il sourit naturellement et c’en est toujours effrayant lorsqu’il retourne devant son écran. Ce garçon, il ne le reconnaît toujours pas. Inconnu qu’il voudrait comprendre.

April, 2019.
Il ne compte plus les jours et il semble heureux sous la pluie, Inseong. L’horizon lui rappelle ce qu’il a laissé derrière, mais il sourit. Les jours s’enchaînent et toujours ces mêmes sentiments passifs, les saisons passent et toujours le même inconnu sur ses clichés. Sa fierté peut bien le retenir, il a toujours su pourquoi. Il a toujours su ce qu’il lui manquait et désormais, il voudrait le retrouver, cet inconnu si vivant. Il n’est plus certain d’avoir fait le bon choix ; plus certain de savoir duquel il parle – plus certain de rien.