❪❫  

personnalité à double tranchant. conscience perturbée entre les deux murs. spectre laiteux abandonné à elle-même, l a s s e et d é s i n t é r e s s é e. elle est de ceux qui prie. de ceux qui pêche, aussi. là où on l'attend, elle s'y trouve, et là où on ne l'attend pas, elle s'y trouve quand même.

h e r a, c'est le f e u. esprit tempêtueux, animé d'une audace que nous renommions a r r o g a n c e, elle est de ceux qui, de leur langue corrosive, flirtent avec la v u l g a r i t é. être antagoniste, elle ne vibre plus que pour les relents malsains qui incorporent les fêlures de son âme et pour la volupté que lui provoquent ces innombrables excès. tumulte des ventricules é b r é c h é s, elle savoure son déclin et constate avec fiévreur la destruction de l'épave qui lui sert de corps – carcasse épidermique usée jusqu'à la moelle, elle résulte du destin inévitable réservée à une femme qui ne désirait trouver son s a l u t que dans sa propre perte.

car hera, c'est la l a v e. elle est de ces cœurs noirs, magmatiques, rongés par les r e m o r d s. de ces séraphins mystifié par leur propre c u l p a b i l i t é, trouvant dans leur reflet leur plus grand ennemi. elle est le t o r t u r é, le m a r t y r d'une société décadente où il ne s'intègre que par la d é b a u c h e – si on se souvient encore de lui. elle brûle hera – elle cherche désespérément un e x u t o i r e à son c o u r r o u x et s'agrippe comme elle peut à n'importe quelle paroi, tant qu'elle tienne, tant qu'elle ne la lâche pas.

et pourtant, hera, c'est l'é r u p t i o n. surprise d'une v i o l e n c e inouïe, inattendue, d'une gamine frêle que nul n'avait pu auparavant soupçonner. il y a cette r a g e ardente qui empourpre ses joues et violette ses phalanges. il y a cette e x p l o s i o n des sentiments, cette p u r g a t i o n des émotions qui la pousse à se b a t t r e. i m p u l s i v i t é dissimulée derrière la silhouette chétive d'un gamin p e r d u, t r o u b l é et i n s t a b l e, dont la m o r g u e sans limite l'engage dans des impasses que nul ne sait comment s'en extirper. étaus claustrophobiques dans lequel elle est piégé à tout jamais, c'est ainsi, dit-on, qu'on connut la fin de l' e n f a n t  t e r r i b l e.

bribes de souvenirs qui resurgissent en pleine nuit. mouvance du rideau dont la légèreté se lit aux travers des mouvements lents qu'il crée, au gré de la brise. cachexie du corps, dont le visage au teint exsangue, enfoui dans un oreiller, est ceint de larmes ensanglantées. un h u r l e m e n t étouffé, et enfin des visions.
flash – flash – flash.

❞ anecdotes

o1. — la génitrice est familière au goudron maculé d' i g n o m i n i e. elle s'en est toujours défendu, mais h e r a sait d'où elle trouve ses origines : elle les tient d'une p u t a i n altière aux pensées viscérales, qui se tord la silhouette pour les f a s t e s p r é s e n t s d'une clientèle argenteuse. elle a les lippes imbibées d'une peinture coruscante et les lèvres qui dévouent pour les incessants quémandages des hommes et de leur perversion intrinsèque. il y en avait eu des signes, pourtant. elle les voyait, mais préférait les ignorer au profit de sa propre c h u t e. elle les sentait, au fond d'elle, mais elle faisait abstraction de leur existence, espérant secrètement qu'en y pensant plus, elle les verrait disparaître. fantasmes utopistes et chimériques d'un monde c r u e l où n u l n e l a i s s e p l a c e a u x r ê v e s, ils sont de ces raisons qui ont conduit l'avilie matrone à dissimuler sa progéniture aux yeux du monde – enfant haïe écartée de l'effervescence new-yorkaise pour ne pas importuner le dévergondage maternel.


o2. — la mauvaise graine, c'était e l l e. elle n'avait été que le prototype, l'échantillon, le b r o u i l l o n de sa mère. sœur n'est point l'ébauche qu'a été sa soeur – elle est la consécration de sa créatrice, le résultat final de l'éternel désir d'enfanter après l'échec de la première tentative, cinq ans après. sœur est différente, différente de h e r a. parangon d' i n n o c e n c e, idéal v e r t u e u x, candeur v i r g i n a l e : elle est le n a c r e de la coquille, le d i a m a n t dans la roche. pureté inégalée pour la brutalité d'un p a n d é m o n i u m terrestre – elle n'est pas à sa place, dans ce monde : elle est trop douce, trop fragile, trop faible pour ce monde qui lui veut du mal. alors elle se retranche, sœur, et s'enferme entre les bras efflanqués d'une soeur, dont la désinvolture assassine l'aura conduite à la m o r t.


o3. — le taudis est de ces somptueux néants qui grésillent au rythme des inhalations nasales de ses occupants. elle est de ces épaves fumantes aux exhalaisons psychédéliques qui se déguisent en empyrées s y n t h é t i q u e s à mesure que la d é p r a v a t i o n envenime ses locataires. h e r a ne fait pas exception à la règle et s'enivre aux procédés morphiniques, à défaut de se dévorer plus qu'il ne consomme. elle trouve ainsi dans son p a r a d i s a r t i f i c i e l un catharsis où elle peut peindre ses maux sans peine, avec la singularité dégénérative qui l'a toujours défini. armature anthropomorphe aux flancs saillants, elle s'éprend, s'entiche, s'amourache à ce qui tombe entre ses phalanges immaculées. elle jouit des v o l u p t u e u x a g r é m e n t s que lui lègue la bonne fortune aux dépens de sa santé déficiente, alternant entre les délectations que lui procurent les substances métamphétaminiques dont elle se substitut. lente a g o n i e du gamin au passé m é p h i s t o p h é l i q u e, elle crie en silence ses peines en agitant le drapeau blanc, espérant trouver en sa première rencontre son s a u v e u r.

o4. — guérie. c'était ce qu'on lui avait dit. ' tu vas g u é r i r '. déliquescence émotionnelle reprochée, nomadisme psychique critiqué. elle est peut-être folle, h e r a. ou peut-être qu'elle ne l'est pas. pédantisme exacerbé, gestes exagérés – tout porte poutant à croire qu'elle est de ces personnages aliénés dont on parle peu, dont on évite l'évocation. un souffle, un sens, une phrase : ' v o t r e e n f a n t e s t u n e d r o g u é e ! ', et le haussement éreinté d'une mère l a s s é e, loin d'être étonnée : ' oui, et alors ? '. elle indigne, la matrone importunée, dont la c o n d e s c e n d a n c e n'a de cesse d'horripiler ses détracteurs. elle choque, la génitrice, asphalteuse froissante au ton acerbe, aux multiples scandales et aux propos injurieux. elle les outrage – la presse publique, les ecclésiastiques, et les services sociaux, tous s'étonnent d'une franchise aussi cassante, et maudissent m è r e de sa cruelle honnêteté. alors ils lui enlèvent ses progénitures , ses touts, ceux qu'elle a prétendument chéri toute sa vie, et les placent dans des familles inconnues avec la promesse d'une guérison. sœur et h e r a sont les e n f a n t s t e r r i b l e s dont n u l ne veut s'occuper – des bambins opiomanes, t o x i c o avant les seize bougies. leurs psychologues les encouragent à poursuivre leur cure, mais h e r a n'entend rien, h e r a ne veut rien entendre. la thoracique en guise de columbarium, les poumons changés en catacombes, elle n'a, le palpitant en fusion, plus les idées claires, et se lance dans une lutte effrénée contre les cellules qui l'empêchent d'aller à la rencontre de son éternelle confidente, sa marie-jeanne. mais elle brûle, h e r a. elle est une b o m b e à r e t a r d e m e n t qui menace d' e x p l o s e r à tout moment. dans les locaux, c'est l' i n c e n d i e, l' a p o c a l y p s e – les flammes ardentes qui assaillent les cabinets détruisent à petit feu le bâtiment et annihilent tous ses e s p o i r s d'abandon t h é b a ï q u e. inévitable chute du damné, déchéance certaine de l' a r c h a n g e.

o5. — sous le stratum citadin grouille dans les bas-fonds de son immeuble la d e n r é e la plus précieuse de busan. elle est de ces marchandises inestimables que l'on troque contre un abonnement monétaire élevé, de ces biens que l'on n'échange qu'en s'assurant de la c o n f i a n c e que l'on peut accorder à ses clients. h e r a se voit c r o q u e - m o r t ensevelisseur, épiant ses m a c c h a b é s avec le profond dégoût que lui inspirent ses a f f a i r e s. c'est sous un costume différent qu'elle effectue la transaction avec la clientèle, revêtant les vêtements d'une fille de p i z z a, livreuse apocryphe réduit à un poste dégradant à l'artiche aisée. sœur n'aime pas sa situation : elle le lui a déjà dit. sœur lui répète inlassablement le danger de ses liaisons et ne cesse de l'avertir à ce sujet, se heurtant au mépris de sa soeur et à la f r a î c h e u r de son ignorance. elle croit avoir sa place dans les hautes sphères, h e r a, et pense pouvoir se hisser au même niveau que les dirigeants autocratiques qui ont détruit sa vie. elle se persuade une destinée semblable aux protagonistes de de palma et ambitionne une ascension pareille à celle de montana. or, à l'instar du héros principal de scarface, h e r a oublie que tout bonheur concède à une fin brutale – abdication v e r t i g i n e u s e m e n t tragique, à la manière de la feue frénésie de son existence débridée, rompue par le m a l h e u r et l' a b a t t e m e n t infligée par l'irrévocable fatalité de la vie.

' si l'aiguille saisit, l'éclipse, elle, est d'autant plus fascinante. '

o6. sœur est morte un lundi d'une o v e r d o s e médicamenteuse. c'était une version euphémistique de son suicide. personne ne l'avait vu venir. il y en avait eu des signes, pourtant. sœur disait souvent qu'elle se sentait mal dans son bahut. que les gens ne la comprenaient pas. qu'elle était une m a r g i n a l e ; un peu comme lui à l'époque. elle s'était crue paria au debut. embardée. à l'écart. prisonnière de sa t o u r d ' i v o i r e, insoumise aux impérieux diktats systémiques. les gens la trouvaient étranges, sœur, avec son teint blafard et son côté anémique. un peu perdue, égarée dans les méandres de ses souvenirs tourmentés. elle les lui confiait, de temps à autres, et, quand l'envie lui venait, s'exhortait à lui avouer à quel point elle pâtissait de la cruauté humaine et jusqu'où elle était prête à aller pour s'ôter de l'inhérente affliction qui la démangeait. malgré ça, elle n'écoutait pas, h e r a, trop absorbé par le renflouement de son compte aux innombrables billets, rares bénéfices de sa vie de fossoyeur. abattue par un énième affront, sœur mit fin à ses jours avec un dosage excessif d'ecstasy dans sa chambre, dit-on, entre une heure et deux heures du matin. n é c r o s e irréversible d'un cœur endolori, soeur s'en veut désormais et prie pour un retour en arrière, les perles opalescentes roulant sur son faciès hâve.

' mais n'oublie pas, toi aussi, qu'un jour, ta morgue te tuera. '

Citation :

en v r a c : suit régulièrement les séances d'un psy de séoul qui lui est attitré. tient depuis un carnet de dessin où elle expose ses pensées les plus intimes. a été contrainte de s'inscrire à un club de théâtre pendant sa cure. a fait une tournée à travers tout le pays pour jouer roméo et juliette. interprétait la végétation dans l'arrière plan de la scène. ne boit plus de café. préfère se rebooster à la mdma. consomme sa propre drogue depuis deux ans. cultive derrière son bat. pantin d'un groupe de dealers. victime de ses employeurs. lui arrive de faire des choses stupides quand elle est defoncée. séjourne dans un appart avec deux de ses amis. ne paie rien. casse la verrerie de ses colocs à grand coups de club de golf. se fait appeler tiger woods par sa deuxième personnalité. est persuadé qu'elle est schizophrène. peut être l'est-elle vraiment. écoute régulièrement ac/dc. complote secrètement contre l'état quand il est high. profondément communiste, voir anarchiste selon son humeur du jour. est persuadé d'être la réincarnation de pablo escobar. fan de star wars mais déteste l'art de steven spielberg. ne comprend pas tarantino. a enter the void pour film préféré. membre actif de la twittosphère. traîne encore sur msn. un brin pyromane. pense que les années quatre-vingt étaient nazes même s'elle n'était pas encore née. déteste les chats. se balade à séoul en skate. y crèche. trouve le chocolat chaud dégoûtant. vierge en astrologie. baise avec des prostituées en songeant quelques heures après que ces meufs auraient pu être sa mère. commence à croire que le complexe d'œdipe est bien réel avant de se resaisir et de se dire que la drogue, c'est mal, et qu'il vaut mieux pour elle qu'elle arrête. puis fume un dragon dix minutes plus tard. n'a pas connu son père biologique. ne sait pas tenir un crayon entre ses doigts sans trembler. mauvais scolairement. foncièrement stupide. se pose des questions existentielles en pleine nuit. parle pendant son sommeil. pense être somnambule même si ses amis attestent le contraire. surfeur des rêves. entend encore la voix de sa sœur dans ses cauchemars. be kind, rewind.